L’horreur une tuerie de « Charlie Hebdo » racontee via ses rescapes

L’horreur une tuerie de « Charlie Hebdo » racontee via ses rescapes

Au 5 e jour du proces des attentats de janvier 2015, les victimes impliquees dans l’attaque terroriste sont venues a Notre barre. Plusieurs temoignages poignants.

Apres les images, des mots. Ce jeudi apres-midi, plusieurs temoins d’la tuerie survenue a Charlie Hebdo sont venus raconter votre matinee du 7 janvier, lors de laquelle onze personnes ont perdu la vie. Une serie de temoignages insoutenables, ponctues de sanglots, mais aussi de silences. C’est d’abord la dessinatrice Corinne Rey, surnommee Coco, qui est venue a Notre barre. Pendant environ trente minutes, la petit copine semble s’i?tre employee a livrer votre recit precis. C’est en 2007 qu’elle arrive chez Charlie Hebdo, pour un stage. « C’est etrange de dire ca pour l’athee que j’suis, mais ca a ete une revelation », dit Coco, traitant d’individus « a J’ai fois serieux et deconnants », « qui avaient 1 grand regard concernant le monde ». Elle revient dans le parcours dans la redaction. C’est en 2014 qu’elle reprend l’espace de Riad Sattouf, « une sacree promotion », se souvient Coco.

Puis vient Hier du 7 janvier. « Notre mercredi, c’est Notre reunion de redaction. Tout un chacun reste la votre jour-la », se rappelle Coco. Alors qu’elle vient de deposer sa petite fille a la creche, elle marche acheter une galette au Franprix. Elle monte nos escaliers, croise Fabrice Nicolino et Laurent Leger, puis appelle Charb Afin de qu’il leur ouvre. « C’etait le petit badge a moi », murmure-t-elle. Sa voix reste deja chargee d’emotion, chevrotante. Elle se souvient de l’entree dans la redaction, d’avoir « chambre Tignous parce qu’il etait un peu en avance », d’avoir dit bonjour a tous. « Cela y avait une ambiance tres forte, joyeuse, on etait contents de se retrouver », dit la dessinatrice, qui se souvient ou chacun semble s’i?tre assis ce jour-la. Alors que Notre reunion de redaction touche a sa fin, Coco decide de s’eclipser pour aller chercher sa propre fille. Elle touche l’epaule de Tignous et propose a Angelique Notre Corre d’aller fumer une cigarette « avant de partir ».

« J’ai d’emblee su que j’ai ete une kalachnikov »

C’est a i§a que leur monde chavire. « Mes terroristes ont surgi en appelant “Coco, Coco”. J’etais un brin stupefaite. Deux hommes armes avec des cagoules sont arrives sur nous. Ca a ete d’une fulgurance dingue. Je sentais en eux la force et la determination. Ils se paraissent mis autour de moi de sorte que je ne puisse avoir aucune capacite de mouvement. Un d’eux a immediatement attrapee avec le bras, il semble s’i?tre mis a cote de moi avec ses kalachnikovs, ainsi, je peux vous dire que Charb dessinait tellement bien les armes que j’ai d’emblee su que c’etait une kalachnikov », entame Coco, qui parle de menaces de mort « permanentes ». Alors que sa voix se noie limite au sein des sanglots, elle poursuit : « On a commence l’ascension de l’escalier. J’avais en moi une detresse absolue d’avoir ces hommes qui me menacent avec leurs armes. J’ai pousse une porte et je me suis rendu compte que je n’etais pas au bon etage une redaction. J’etais incapable de reflechir. » Corinne Rey mime alors De quelle fai§on cette dernii?re s’est accroupie, les mains sur la tete. Presque cachee sous le pupitre d’ou elle s’exprime, elle revit la scene. « Je un ai devoile : “Pardon, pardon, je me suis trompee d’etage.” »

Cherif Kouachi lui lance alors : « Pas de blague, sinon on te descend. » « On est montes au deuxieme etage, puis ils m’ont evoque : “On veut Charb.” » Comme depossedee d’elle-meme, elle compose le code d’entree. « Je sentais que les terroristes approchaient de leur but, je sentais leur excitation, la mort arriver », detaille J’ai jeune soeur. Mes voila dans le hall d’entree, et la, les premiers « tac tac tac », selon ses mots. Puis cette pensee, qu’elle estime « absurde » : « J’me suis evoque que c’etait nul, le bruit de la arme. » « Plusieurs petards ? » devoile Luce, « un radiateur qui explose ? », crois Riss. Neanmoins, c’est beaucoup le bruit des armes qui resonne dans la redaction. Puis celle-ci revient sur les secondes qui ont suivi. Notre tuerie, dans toute le horreur. « Apres les tirs, ils font eu le silence, un silence de fond », souligne votre petit copine. Elle sort de sa cachette, https://datingmentor.org/fr/little-people-meet-review bien qu’inquiete que les terroristes ne viennent « finir le travail ». C’est la qu’elle voit Mustapha Ourrad, le correcteur. Cela a le regard ouverts et baigne dans le sang, qui est deja « tel une pate, marron ». Dans la salle de redaction, elle reconnait aussi Cabu, distingue des miettes, « parce qu’il mangeait du pain pendant la reunion ». Devant elle s’etend l’horreur du massacre.

« J’avais accepte de mourir »

Ce theatre macabre, c’est aussi ce que decriront successivement Sigolene Vinson et Laurent Leger ou Cecile Thomas, egalement appeles a la barre. D’une voix fort douce ponctuee de sanglots, Sigolene Vinson, avocate de formation et ancienne chroniqueuse judiciaire a Charlie Hebdo, se souvient des premiers coups de feu. Elle a d’emblee compris de quoi il s’agissait. « Cela y avait Franck [Brinsolaro, le policier en charge en protection de Charb, NDLR], J’me rappelle avoir senti son torse contre le mien. Je ne sais nullement si je l’ai gene, il a dit : “Il ne faudrait pas bouger de facon anarchique.” » « Et j’ai bouge de facon anarchique », lache-t-elle en larmes.

Alors qu’elle se crois touchee dans le dos, elle tombe puis se traine pour se dissimuler derriere une bri?ve cloison. C’est la que Cherif Kouachi la rejoindra pour l’invectiver. « J’ai compris que le tueur m’avait vue partir et qu’il me suivait, j’entendais ses pas. Et en me suivant, il a croise Mustapha, qui reste tombe. Comme 1 fusille. Notre tueur a surplombe le muret, il est habille bien en noir avec sa cagoule. Cela a secoue sa tete tel une hesitation, comme lorsqu’il cherchait mon nom. A ce moment, j’avais accepte de mourir, je n’avais plus de peur a ce moment, j’ai tout lache. » Arme baissee et doigt en l’air, le terroriste la somme de se calmer, lui dit « qu’ils ne tuent jamais ces dames », ainsi, puis que comme ce qu’elle fera « reste mal », il lui devoile que l’on doit « lire le Coran ».

J’ai scene de guerre

Et de nouveau les images insupportables. La peau de Bernard Maris, au sein d’ le costume pied-de-poule, qu’elle n’aimait nullement parce qu’une veste et une petite robe pied-de-poule, « c’est trop de pied-de-poule pour un seul homme ». Sa cervelle eclatee aussi. Puis Fabrice Nicolino, qui rale a cote. Il va i?tre blesse aux jambes. Agenouillee dans une flaque de sang, elle lui passe un torchon mouille sur le visage. « J’avais oublie qu’une artere femorale, ca pouvait etre fatal », halete Sigolene Vison, qui possi?de besoin de marquer de multiples pauses dans le temoignage. Elle portait beaucoup une ceinture votre jour-la, mais ne sait pas comment faire votre garrot a « Fabrice », dont des os « sortaient de partout ».

Le recit de Laurent Leger est plus court, plus reserve. Il se rappelle avoir vu un « premier type », « grand comme ca », dit-il en depliant ses bras de tout un long. « On pensait a un quidam du GIGN, mais en realite il crie “Allah Akbar” et la je comprends qu’on reste attaques. » Tout va alors tres vite, il se trouve sous une table, completement recroqueville sur lui-meme. Alors il se souvient de la image qu’il a « i  chaque fois en tete » : le crane de Georges Wolinski qui git devant lui. Plus loin, des formes indistinctes. Comme les autres avant lui, il pense que ce moment a dure « une eternite ». En realite, tout a mange tres vite. Lui aussi se souvient des trucs secs : « tac tac tac ». « J’ai compris apres que c’etaient des deflagrations, comme s’ils avaient tente de viser les uns et les autres », dit-il. Cela se prepare lui aussi a etre tue, « puisqu’apres bien, ils viennent tuer tout le monde ».